Et une histoire sans nom, une !

″ Je te promets de toujours rester à tes côtés, quoi que le destin nous fasse subir, quoi que la vie nous impose. Je braverais toutes les épreuves et franchirais tous les obstacles qui se dresseront sur ma route pour pouvoir t’ouvrir le chemin et n’avoir qu’à me retourner pour te tendre la main que tu attends. ″

C’est ce qu’il m’avait dit, la promesse qu’il m’avait faite. Nous étions même allé jusqu’à nous couper avec un éclat de verre et a mélangé nos sang, paume contre paume, yeux dans les yeux.

Et maintenant, son corps repose dans ce cercueil. Le dernier souvenir que j’ai de lui : un jeune garçon, même pas encore un adolescent, sa tête sur mes genoux, au visage pâle et transparent de souffrance profonde, des yeux bleu foncé remplient de tant de mots non-prononcés, des cheveux noirs comme le jais étalé sur ma jupe, pleins de terre et de boue que sa chute a entremêlé. Mais le pire se sont ces yeux : on y lit tant de souffrance, mais aussi de l’amour, du regret … Un mélange si triste et si beau à la fois … Et puis il a fermé les yeux, et les médecins l’ont emmenés.

Ils m’avaient pourtant assurés qu’il s’en sortirait : ″ Ne vous inquiétez-pas, tout est sous contrôle, il ira bien et reviendra bientôt à lui, une fois guéri ! ″. Et pourtant, le lendemain, ils vinrent me trouver, chez ma mère et m’annoncèrent de but-en-blanc qu’il était décédé durant son opération. Je me rappelle de la souffrance que j’ai ressentie, des bras de ma mère qui m’entouraient, des larmes qui coulaient sur mes joues, de mes genoux qui se dérobèrent sous le poids de ma douleur, du visage défait de ta famille et des larmes, toujours et encore présentes, comme si elles me poursuivaient pour me rendre folle.

Et aujourd’hui nous t’enteront, non pas dans le cimetière de ma famille, comme j’aurais aimé, mais dans l’endroit que tu as toujours adoré, celui dans lequel nous passions le plus de temps, le petit jardin derrière la maisonnette où nous allions si souvent nous cacher. On ne m’a pas donné l’autorisation de voir ton corps, de peur que le choc déjà immense, ne soit irrémédiable pour moi, mais j’aurais aimé avoir comme derrière image de toi une autre que celle de ton agonie silencieuse. Je pose un immense bouquet iris Night All et de roses rouges sur ton cercueil, tes préférées, celles qui poussaient dans le champ si proche d’ici et ton père commence à te mettre en terre. Je sais que je ne dois pas craquer et m’effondrer, malgré tout le poids qui repose désormais sur mes épaules et je reste debout, comme insensible au vent qui souffle dans mon dos et aux pleurs des gens qui m’entourent.

Les fossoyeurs embauchés par ta famille font glissé la pierre qui referma ta tombe à jamais et c’est comme si on venait d’enterrer une partie de moi avec toi. Je souffre et pourtant, je ne peux pas me permettre de le montrer, sinon, tout ce que tu auras accomplis auprès de moi m’aura été inutile. Petit à petit, les gens se retirent : ta famille, ton mentor, tes quelques amis et pour finir, il ne reste que moi, accroupie près de toi, à arranger les vases de fleurs et je pleure silencieusement, une fois seule.

Il n’y aura plus personne à mes côtés pour me soutenir, il n’y aura plus personne pour me relever et me dire de continuer à me battre. Et pourtant, je vais continuer à le faire. Pour toi. Pour honorer ta mémoire et mes promesses. Pour que tu sois fier de moi et de la personne que je deviendrais.

Attend voir, toi qui as tout donné pour moi, je te vengerais ! Et personne n’oseras plus jamais faire du mal aux personnes qui me sont chères !